Déclaration de SUD éducation au CSA en réponse aux annonces gouvernementales (6 décembre 2023)

Lors du CSA du 6 décembre 2023, SUD éducation est revenu sur les annonces du ministre suite aux résultats de l'enquête PISA, sur l'école inclusive et le cadre d'emploi des AESH et sur la grève des lycées professionnelles du 12 décembre.

Ce CSA avait pour objet la présentation du Rapport Social Unique (RSU) et le bilan du plan égalité Hommes-Femmes pour 2021-2023.

La déclaration de SUD éducation

Mesdames et Messieurs les membres du CSA,

Lors de sa prise de fonction, le ministre Gabriel Attal avait rappelé son attachement fort au dialogue social. L’école a besoin de transformation et on ne transforme pas l’école sans celles et ceux qui la font vivre au quotidien.
Trois mois à peine après la rentrée, on est en droit de constater que cette noble préoccupation ne s’est pas muée en acte. Les organisations syndicales représentatives se sont opposées au passage de la formation continue au 100% hors obligation réglementaire de service dans le second degré, au projet de stage de deux semaines en classe de seconde, aux lignes directrices de gestion.
Sur chacun de ces sujets, les syndicats ont alerté sur les effets néfastes de ces projets pour les personnels et pour le service public d’éducation. Sur tous ces sujets, le ministre refuse de revoir sa copie.

Hier, un nouveau pas a été franchi avec les dernières annonces ministérielles : loin de créer un choc des savoirs, le ministère a fait le choix de mesures de tri, de sélection et de ségrégation sociale. Plutôt que de donner davantage de moyens pour les élèves les plus fragiles, qui en ont le plus besoin, le ministère sanctionne ces élèves via le redoublement, les groupes de niveau ou l’impossibilité de s’inscrire au lycée.

L’entêtement du ministère est particulièrement inquiétant sur le sujet de l’école inclusive. SUD éducation a rappelé à de nombreuses reprises son attachement à l’école inclusive. Pour SUD éducation, c’est bien à l’école de s’adapter aux besoins des élèves et non l’inverse. Le service public d’éducation doit donner la possibilité à tous les élèves d’accéder à une scolarité de qualité, la ségrégation sociale que subissent les personnes en situation de handicap dans la société trouve en partie son origine dans la ségrégation scolaire et c’est bien le rôle de l’école que de briser cette chaîne qui conduit les personnes en situation de handicap des instituts médico-sociaux aux ESAT.
Or, affirmer que tous les élèves ont leur place à l’école ne suffit pas : pour défendre ce postulat d’éducabilité de tous les enfants, il faut d’une part de vrais moyens pour accueillir des élèves aux besoins très différents à l’école et d’autre part il faut garantir à tous les élèves l’accompagnement médico-social dont ils ont besoin.
Actuellement, la majorité des élèves qui relèvent de l’inclusion n’ont accès ni à de véritables compensations à la hauteur de leurs besoins ni à un véritable accompagnement médico-social. Cette situation génère de la maltraitance des élèves, mais également de la maltraitance des personnels abandonnés par l’institution.
La transformation des PIAL en PAS témoigne de l’incapacité du ministère, et plus largement du gouvernement, à entendre les besoins des personnels et des élèves : ceux et celles-ci n’ont pas besoin de davantage de mutualisation, ils ont besoin de davantage de moyens. L’école inclusive est en panne car les moyens attribués pour la scolarisation des élèves résultent non pas des besoins des élèves mais des moyens disponibles dans le PIAL. Cette logique de mutualisation des moyens va s’aggraver avec le PAS puisque l’Éducation nationale entend reprendre la main sur l’ensemble des notifications d’accompagnement y compris les notifications en accompagnement individualisé. SUD éducation dénonce la mise en oeuvre des PAS et réclame au contraire la réalisation d’un véritable bilan des PIAL.

De plus, l’école inclusive ne pourra pas se réaliser sans des formations ambitieuses disciplinaires et didactiques mais aussi sans les personnels, les enseignant·es spécialisé·es, les personnels médico-sociaux et les AESH qui sont devenus de véritables professionnels du handicap. Or, les personnels AESH sont maintenus par le ministère dans une précarité insupportable. Avec des salaires de 900 euros en moyenne, les annonces de revalorisation sont très insuffisantes. La professionnalisation du métier d’AESH résulte de la reconnaissance des compétences spécifiques développées par les personnels AESH via un statut de la Fonction publique avec un temps de travail adapté au temps scolaire. Les tentatives de généralisation du double employeur et d'alourdissement des missions des personnels AESH et AED avec le projet d’ARE sont des dégradations supplémentaires des conditions de travail et des conditions de scolarisation des élèves en situation de handicap. Le récent rapport de la CNCDH concernant les politiques publiques du handicap constate que les AESH “forment de véritables piliers pour l’inclusion scolaire”, puis que “la pression économique exercée sur les AESH ne peut qu’avoir une incidence défavorable sur leurs conditions de travail ainsi que sur la qualité de l’accompagnement proposé aux élèves en situation de handicap.” Le rapport de la CNCDH comme les productions de la Défenseure des droits dénoncent les conditions d’emploi des personnels AESH.

SUD éducation porte des revendications pour l’école inclusive :

la création d’un statut de la Fonction publique avec un temps plein de 24h pour les AESH,
la baisse du nombre d’élèves par classe,
la formation des personnels,
le recrutement de personnels médico-sociaux et la formation d’enseignant·es spécialisé·es.

Par ailleurs, le ministère semble oublier que l’inclusion scolaire ne concerne pas seulement les élèves en situation de handicap, mais également les élèves allophones, les élèves non scolarisés auparavant et les élèves en difficulté scolaire. Ces élèves existent, ils ont droit à une scolarisation adaptée à leurs besoins. Il y a urgence à leur garantir un vrai accompagnement médico-social, à assurer leur double inscription à la fois dans le dispositif d’inclusion et dans leur classe et à permettre l’intervention de personnels spécialisés, à commencer par les RASED.
Le ministère fait le constat de graves difficultés à recruter des personnels, l’école est pourtant le terreau de notre démocratie, elle est un rempart à l’obscurantisme, au fanatisme et à l’exclusion. Les personnels le savent et ils sauront se mobiliser pour défendre le service public d’éducation et l’école inclusive.

Par ailleurs, en maintenant leur « réforme » contre l’avis de tous les personnels, le ministre et le président Macron poursuivent l’œuvre de destruction des LP. Alors que la réforme Blanquer du bac général a été révisée, le gouvernement s’obstine à imposer une augmentation du temps des stages, réduisant significativement le nombre d’heures de cours et désorganisant l’année de terminale Bac Pro. Rappelons que les maigres indemnités distribuées aux élèves sont prélevées sur de l’argent public. La révision de la carte des formations, qui est censée aboutir à la fermeture de 100% des formations « non insérantes » à la rentrée 2026, va conduire à des suppressions de postes et des reconversions forcées. Contre ce démantèlement, SUD éducation appelle les personnels à protester par la grève le mardi 12 décembre prochain.

Au lieu de créer les postes nécessaires dans toutes les catégories professionnelles de notre secteur, le ministère multiplie les annonces au mieux vaines, au pire réactionnaires, comme en témoigne le retour de la rengaine du redoublement. Le budget 2024 pour l’éducation, par ailleurs toujours favorable au privé, est très insuffisant au regard des besoins : les dotations horaires arrivant dans les académies dès janvier 2024 seront très insuffisantes et obligeront les équipes à se mobiliser. Les salaires sont toujours très insuffisants, et le Pacte ne répond en rien aux besoins des personnels, et renforce les inégalités, notamment femmes-hommes. Nous aurons l’occasion d’y revenir au cours de ce CSA.
Enfin, il est clair que le ministère de l’Éducation nationale ne met absolument pas en œuvre les moyens nécessaires pour la prévention et pour garantir l’obligation de santé des personnels.

De la maternelle à l’université, l'amiante, hautement cancérogène, est présente dans une grande partie de nos établissements scolaires. Sa dangerosité augmente avec la dégradation des matériaux. Il y a là un enjeu de santé publique majeur et SUD éducation revendique le retrait complet de l’amiante de tous les bâtiments.

Manque de moyens pour l’école inclusive, politique éducative réactionnaire et libérale, dégradation des conditions de travail : si le ministère refuse d’entendre les revendications personnels de l’Éducation nationale, alors ils trouveront les moyens de se faire entendre pour défendre leurs droits et le service public d’éducation.