CSE du 8 février 2024 : déclaration de la fédération SUD éducation

À SUD éducation, nous avons une conviction profonde, ancrée, au fondement de notre engagement syndical et pédagogique : celui de l’éducabilité de tous les enfants.

Nous sommes en effet convaincu·es que le rôle de l’école n’est pas de renvoyer les élèves à leurs difficultés mais bien d’agir au sein de l’école pour leur permettre d’apprendre, d’évoluer, de se transformer. Tous les élèves n’empruntent pas le même chemin pour apprendre : certains élèves tâtonneront pendant des années avant de trouver du sens, d’autres seront à l'aise en primaire et au collège mais cela n’assure pas une scolarité sans détours. Il y a sans doute autant de chemins que d’élèves. Néanmoins, c’est bien à l’école de s’adapter à ces chemins divers des élèves qui n’ont pas à faire la preuve de leur capacité à être là, à l’école.

Avec la réforme Choc des savoirs, vous avez touché à cette conviction profonde à SUD éducation mais plus généralement chez les personnels. Vous avez développé une série de mesures qui visent à faire peser sur l’élève et sa famille la responsabilité de son échec, en faisant fi des déterminismes sociaux et des difficultés de chacun·e. Votre réforme rend les “mal-apprenants” responsables de leurs difficultés, c’est-à-dire les élèves en situation de handicap , les élèves allophones, les élèves en difficulté scolaire et sociale. Alors que le service public d’éducation devrait donner plus aux élèves qui en ont le plus besoin, vous avez choisi de les stigmatiser, de les exclure, de les punir. Le redoublement imposé, les stages de réussite, les classes préparatoires à la seconde, les groupes de niveau… sont autant de mesures vexatoires et discriminantes.

Toute votre réforme repose sur l’idée selon laquelle l’hétérogénéité serait un problème et empêcherait les élèves de progresser. C’est ce postulat qui vous conduit à créer des dispositifs de ségrégation, or il est erroné : l’hétérogénéité des classes permet aux élèves de progresser quoiqu’en pensent les esprits les plus élitistes et les plus étriqués. L’institution fait de l'hétérogénéité un problème alors que c’est le manque de moyens pour prendre en charge cette hétérogénéité qui est problématique. La première mesure pour élever le niveau et lutter contre la difficulté scolaire est de baisser le nombre d’élèves par classe. C’est la condition indispensable pour faire progresser tous les élèves, même les élèves qui, du fait de leur handicap, de leur parcours, de leur milieu social, réussissent le moins bien.

Alors que le ministère fait de l’école inclusive une vitrine, la réforme Choc des savoirs vient percuter les exigences de l’école inclusive. Elle met au jour le hiatus entre d’un côté la politique éducative normative du ministère qui évalue, tri, sélectionne, conditionne les élèves et les maintient dans des assignations sociales, et de l’autre l’exigence d’une école inclusive où les élèves sont accompagnés pour progresser dans le respect de leur rythme, d’une école sans harcèlement où il fait bon d’apprendre et d’être élève. Votre école insiste sur une vision étriquée des fondamentaux, alors que nous portons un projet d’école émancipatrice pour tou·tes où les tâches et activités complexes sont fondamentales.

Le Choc des savoirs, comme la généralisation du SNU ou encore les annonces sur l’uniforme, mettent au jour le projet du gouvernement : celui d’une école de l’obéissance et de l’ordre social où on apprend aux pauvres, aux personnes racisées, aux femmes et aux minorités de genre comme aux personnes handicapées à rester dans une place subalterne. Contre le lexique guerrier du gouvernement délirant sur le “réarmement”, nous opposons à SUD éducation des valeurs de démocratie scolaire et sociale, de pacifisme, de coopération et de non-concurrence.

L’école publique du XXIe siècle est confrontée à des défis écologiques et sociaux majeurs : qu’attendez-vous pour mener une politique à la hauteur ?

Les personnels de l’éducation savent les mesures qui doivent être prises pour garantir l’accès de tous les enfants au service public d’éducation : ils l’ont exprimé par la grève le 1er février puis le 6 février et ils sont prêts à se mobiliser dans la durée pour arracher des victoires.

Vous avez commencé à reculer puisque vous ne parvenez plus à défendre les “groupes de niveau” de votre projet de texte sur la réorganisation du collège. À présent que vous avez renoncé à convaincre sur une partie du fond idéologique de votre réforme de tri social, celui des groupes de niveau, il faut aller plus loin en renonçant aux classes préparatoires à la seconde et abandonner la forme de cette réforme, celle des groupes, de la casse des classes et de la désorganisation des collèges.

SUD éducation porte haut, à l’occasion de ce Conseil supérieur de l'éducation, les revendications des personnels : celle de l’abandon de la réforme Choc des savoirs, de vraies augmentations de salaires, de la création d’un statut de la Fonction publique pour les AESH, sans qui l’école inclusive n’existe pas, et la baisse du nombre d’élèves par classe, en particulier en éducation prioritaire.